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Une brève histoire de l’agriculture au XXème siècle

Pour bien comprendre les méthodes alternatives de production agricole et appréhender leurs spécificité, revenons sur l’évolution de l’agriculture au XXème siècle.

 

Prenons l‘exemple du blé (Source : Bernard Ronot, agriculteur retraité lors d’une conférence organisée par Terre de liens, le 9 avril 2013).

Lors de la première guerre mondiale, une quantité très importante d’explosifs contenant des nitrates a été utilisée dans les tranchées. Quelques années plus tard, on s’est aperçu qu’une végétation luxuriante poussait aux endroits chargés en nitrates. Comme il restait de nombreux stocks, ceux-ci ont été fourni à l’agriculture, ce qui a permis d’augmenter fortement les rendements.

Par ailleurs, les blés cultivés traditionnellement étaient de grande taille mais versaient au vent, on s’est donc mis à produire des blés nanifiant. Ces nouveaux blés ont alors été en concurrence avec le villepin (plante adventice) et on s’est mis à utiliser un désherbant. Les blés anciens, du fait de leur taille importante, avaient un système racinaire plus développé et résistaient ainsi mieux à la sécheresse, contrairement aux nouveaux qui avaient besoin d’être beaucoup plus arrosés. L’humidité permanente favorisant l’apparition de champignons, un fongicide a été pulvérisé sur les cultures. Lorsque la sève était en excès, il y a eu des attaques de pucerons qui ont été contrôlées grâce à un insecticide.

Si nous résumons le processus : pour augmenter les rendements, l’utilisation d’engrais et de variétés améliorées a rendu les cultures beaucoup plus fragiles, susceptibles d’être concurrencées par les adventices et dévastées par les ravageurs, ce qui a eu pour conséquence l’utilisation massive de désherbants, de fongicides, de pesticides et d’insecticides.

Ce processus n’est pas spécifique de la culture du blé, il est présent dans toutes les formes d’agriculture industrielle.

 

Par ailleurs, le labour en profondeur a conduit à la détérioration des sols, souvent irréversible, détruisant la microfaune et la microflore qui permettent leur régénération et la conservation de leur structure perméable. Ainsi, lorsqu’il pleut, l’eau, au lieu d’être stockée, ravine en emportant avec elle des tonnes de terre arable (de 12 à 250 tonnes par hectare d’après Janine M. Banyuls dans son ouvrage Biomimétisme p. 33), provoquant des inondations et des catastrophes naturelles.

De plus, ce mode d’agriculture est très énergivore : pour produire 1 kilocalorie de nourriture, on utilise 10 kilocalories d’hydrocarbures.

 

En résumé, dans le but d’augmenter les rendements à tout prix, l’agriculture industrielle :

  1. détruit les sols,
  2. cause des maladies graves chez de nombreux agriculteurs (cf. l’émission Cash investigation – Produits chimiques : nos enfants en danger du 8 février 2015),
  3. pollue de manière grave et durable l’environnement, causant une augmentation inquiétante de nombreuses maladies dont sans doute les cancers (le nombre de nouveaux cas de cancer en France est passé de 150 000 par an en 1980 à 355 000 en 2012), l’autisme chez les enfants (il s’agit d’une pandémie mondiale, aux Etats-Unis par exemple, le nombre de cas d’autisme chez les nouveaux-nés est passé de 1 sur 2500 en 1985 à 1 sur 68 en 2015 d’après les données collectées pour l’émission Cash investigation – Produits chimiques : nos enfants en danger du 8 février 2015),
  4. gaspille une source d’énergie précieuse (le pétrole et tous ses dérivés) accumulée pendant des millions d’années,
  5. obtient des rendements qui stagnent et des dégâts de plus en plus importants sur les récoltes car les ravageurs s’adaptent au pesticides et on est obligé de pulvériser des produits de plus en plus dangereux,
  6. conduit à la disparition progressive des abeilles,
  7. exproprie de très nombreuses familles de paysans dans le monde entier, qui produisaient pourtant de manière durable, avec un bon rendement, et maintenaient la biodiversité des céréales et des légumes, tout en protégeant les écosystèmes.

 

En réalité, l’agriculture industrielle a exploré une seule direction : se dégager de toutes les lois de la nature en la considérant souvent comme hostile, s’affranchir de toutes les spécificités des terroirs (uniformisation des méthodes, des légumes, des céréales et des fruits) dans le but de produire en très grande quantité, sans considération pour la valeur nutritive et gustative des produits, le prix à payer étant une dépense énergétique importante et un usage systématique de produits dérivés du pétrole.

Il faut cependant reconnaître que ce type d’agriculture a un point fort : la capacité à cultiver une grande surface avec très peu de main d’oeuvre (grâce à la mécanisation).

 

D’une certaine manière, la quintessence de l’agriculture industrielle est la production sous serre de légumes hors-sol, on s’affranchit ainsi :

C’est un peu comme si on décidait de nourrir des êtres humains uniquement en les mettant sous perfusion avec un peu de glucose, de sels minéraux etc. Seraient-ils en bonne santé ?

 

La monoculture repose sur une croyance en partie inexacte : les plantes sont toujours en concurrence entre elles et pour avoir un rendement maximal pour l’une d’entre elles, il faut éliminer toutes les autres. Si on appliquait ce type de vision simpliste au management dans une entreprise, on mettrait systématiquement en compétition les membres d’une équipe pour avoir une meilleure productivité globale. Le résultat serait tout aussi négatif pour l’efficacité que pour l’ambiance générale ! Pourtant, ce mode de pensée est assez répandu dans toute la société et s’applique aussi assez aveuglément en agriculture. En réalité, la concurrence entre les végétaux existe bien sûr, mais la collaboration est tout aussi présente, certaines plantes en protégeant d’autres, favorisant leur développement et leur croissance. Plus généralement, si la biodiversité est importante, l’ensemble des végétaux présents participe à la santé globale de l’écosystème. On peut ainsi avoir des rendements globaux plus élevés en polyculture qu’en monoculture.

 

Une deuxième idée  sous-tend souvent la vision industrielle de l’agriculture, la vision chimique. Dans une équation chimique irréversible, à partir de réactifs on obtient des produits (et éventuellement de l’énergie). Si on applique ce modèle à l’agriculture, on raisonne de la manière réductrice suivante : à partir de l’azote, du potassium, du phosphore et des oligo élements, on produit un légume. Si le légume ne pousse pas bien ou est malade, c’est qu’il manque un nutriment et il faut en rajouter sous forme d’engrais, il n’y a pas d’autre solution. C’est une vision simpliste qui exclut complètement l’aspect vivant de la croissance d’un végétal, avec les millions d’interactions entre les bactéries, les champignons, les micro-organismes du sol, les symbioses, les synergies etc. Par exemple, même s’il n’y a pas au départ tel ou tel composant dans le sol, la micro-faune du sol peut le produire (ou bien une autre plante), comme dans le cas de l’azote avec les bactéries fixatrices d’azote des légumineuses.

 

Devant les pratiques de agriculture industrielle, et leurs effets nocifs pour les hommes et leur environnement, pratiques qui ne profitent souvent qu’à quelques grands propriétaires fonciers, qu’à quelques multinationales, investisseurs ou consortiums, de nombreuses voix se sont élevées pour trouver des solutions alternatives.

Un de leurs points communs est de cesser de considérer les lois de la nature comme uniquement limitatives, mais au contraire de s’en inspirer pour créer une agriculture efficace, durable et respectueuse de l’environnement.

Au lieu de voir la nature uniquement comme un ennemi à combattre, l’idée est de l’appréhender aussi comme un allié à respecter, voire comme une source d’inspiration et un modèle d’efficacité, de résilience, de collaboration entre les espèces animales et végétales.

 

Depuis des années, de nombreux chercheurs ont commencé à explorer ce domaine :

  1. Manasobu Fukuoka avec son agriculture naturelle au Japon,
  2. Sepp Holzer avec sa permaculture en Autriche,
  3. Robert Hart et la notion de forêt comestible au Royaume-Uni,
  4. Pierre Rabhi et son approche agroécologique en France,
  5. Gilbert et Josine Cardon avec leur jardinage biologique et permaculturel à Mouscron en Belgique,
  6. de nombreux agriculteurs à Cuba qui pratiquent l’agroécologie depuis des années,
  7. Charles et Perrine Hervet-Gruyer dans leur ferme du Bec Hellouin en France,
  8. John et Nancy Todd avec le New Alchemy Institute au Cap Cod,
  9. Jack Ewel et Corey Berish avec l’agriculture sur trois niveaux au Costa Rica,
  10. Eliot Coleman aux Etats-Unis avec ses méthodes inspirées des maraîchers parisiens du XIXème siècle,
  11. les Papagos et les Cocopas dans les déserts de Sonora, de Chihuahua et de Mojave, dont les pratiques sont décrites par l’ethnobotaniste Gary Paul Nabhan dans son livre Gathering the Desert,
  12. la famille Rodale et son agriculture régénératrice aux Etats-Unis,
  13. Emilia Hazelip avec sa culture en synergie en France,
  14. Bill Mollison avec la permaculture en Australie,
  15. Sepp Holzer avec ses méthodes de régénération des déserts,
  16. Philip Forrer et son jardin extraordinaire en France,
  17. Patrick Whitefield et son jardin-forêt en Grande-Bretagne,
  18. Richard Wallner et sa culture sur buttes en France,
  19. de nombreux acteurs qui cultivent de manière biologique depuis des années en expérimentant des pratiques culturales « avec » la nature et non pas « contre » elle,
  20. un très grand nombre de sociétés traditionnelles qui ont depuis des siècles utilisé toute leur créativité et leur intelligence pour créer une agriculture durable.

Cependant les moyens employés pour explorer ces directions alternatives sont souvent dérisoires devant ceux utilisés pour développer l’agriculture industrielle et nous n’en sommes qu´aux balbutiements de ces approches nouvelles et inspirantes.

 

Parmi toutes les expérimentations citées ci-dessus, j’en ai choisi quelques unes que je vais développer plus en détail. Le fait de connaître toutes ces pratiques alternatives permet d’améliorer l’efficacité la qualité de ses propres cultures ( en particulier sur balcon où certaines approches peuvent être utilisées ou adaptées).

Méthodes alternatives

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